Né le 13 octobre 1825 à Bourne au Royaume-Uni et décédé le 10 mars 1895 à Paris, il fut le couturier favori de l’impératrice Eugénie et de nombreuses clientes richissimes françaises et étrangères.
– Inventeur de la « haute couture » car c’est lui qui propose ses modèles et peut les adapter aux mesures personnelles de ses clientes
– il montre ses créations sur des modèles vivants qui défilent dans un salon et non plus sur des poupées habillées
– il crée la notion de « collection » hiver et été
– il ouvre sa « maison de couture » lieu de création » et sa boutique « lieu de vente » au 7 rue de la Paix
– il appose sa « griffe » sur chaque vêtement
Ces concepts de marketing ont été repris par les maisons de couture qui se sont crées ultérieurement en France et dans le monde.
Ses débuts à Londres puis à Paris
Dernier d’une famille de 5 enfants, au père absent et joueur, Charles travaille déjà à 11 ans. Il rêve de Londres et la rencontre d’un avocat le fait entrer chez un marchand de nouveautés Swan & Edgar où il reste 7 ans. Il découvre les belles étoffes et les « nouveautés » arrivant de Paris. Nouveau rêve pour Charles.
En 1846 il arrive à Paris et entre chez Gadelin, rue de Richelieu, comme premier commis aux soieries et aux châles. En mais 1853 il s’associe aux deux dirigeants Gadelin. La maison compte une centaine d’ouvrières et diffuse ses modèles dans la presse sous forme d’annonce.
Il fait la connaissance d’une vendeuse qu’il épouse et qui deviendra sa muse, son mannequin préféré.
Le 6 avril 1858 il s’associe au suédois Otto Gustave Boberg, qui dispose d’un capital coquet et crée ainsi la maison Worth et Boberg au 7 rue de la Paix.
Une notoriété grandissante
En 1864 la société Worth et Boberg devient le fournisseur breveté de l’impératrice Eugénie.
En 1870 la guerre franco-prussienne et l’exil des souverains français ralentit les mondanités. Boberg revend ses parts et rentre en Suède. WORTH devient indépendant dans sa maison.
Sa notoriété dépasse les frontières françaises et sa clientèle vient de Russie, du Moyen-Orient, d’extrême-Orient et même d’Amérique. Sa langue natale lui permet de communiquer en anglais avec ses clientes, ce qui facilite grandement les échanges avec la haute société internationale. Porter une robe Worth est un marqueur social; ainsi que se faire représenter par un peintre. C’est pourquoi nous avons de nombreux tableaux de femme de la haute société en pied avec une robe Worth (tel que Franz Xavier Winterhalter) et des photos grâce à l’invention de la photographie au début du XXe siècle. La haute couture est indissociable du climat artistique général.
Worth passe d’importantes commandes de tissus aux grandes manufactures lyonnaises et obtient ainsi de bons tarifs. Il lance la mode de la dentelle mécanique (dentelle de Calais). Les nouveaux colorants chimiques lui permettent d’élargir sa gamme de couleurs. Les femmes devant changer plusieurs fois de tenue par jour, Worth invente l’astuce des robes « à transformation » avec plusieurs corsages et des parties amovibles.
En 1867 Paris brille de tous ses feux à l’occasion de l’exposition universelle qui attire plusieurs millions de visiteurs. L’élite des cours princières est présente pour assister aux réjouissances offertes par Eugénie et Napoléon III et aux bals costumés organisés dans la capitale où Worth donne libre cours à son imagination pour des créations. C’est également Worth qui fera la robe de couronnement de reine de Hongrie d’Elisabeth, alors impératrice d’Autriche, le 6 Juin 1867.
Une clientèle américaine va découvrir les créations parisiennes à l’occasion d’un voyage en Europe et des caisses spécifiques seront conçues par la maison Vuiton pour le transport en bateau, des toilettes fragiles. Des vendeuses anglophones seront embauchées pour faciliter les relation avec la clientèle.
Sa famille s’est impliquée dans la société Worth
Sa femme : Marie Vernet 1855– 1895
ses enfants : Gaston 1853-1924 et Jean-Philippe 1936-1926
Ses petit-fils : Jean-Charles Worth 1881-1962 et Jacques 1882-1941
Ses arrière-petit-fils : Roger 1908-1981 et Maurice 1913 – 1985 (fils Jacques)
A la mort du créateur en 1885, ses deux fils Gaston et J-Philippe reprennent l’entreprise.
En 1895 son fils Gaston reprend le contrôle de l’entreprise familiale et réalise des investissements avisés tandis que J-Philippe devient le créateur principal. C’est un artiste (ayant suivi des cours avec le peintre Camille Corot), un mondain, un amateur de théâtre. Il crée des robes-tunique, des caftans, des robes kimono, nourrit de l’exotisme en vogue à la Belle-Epoque. De lignes plus modernes que son père, ses créations, faites pour l’apparat, utilisent des étoffes précieuses et des broderies,
En 1901 Gaston engage Paul Poiret (1879-1944) remarqué chez Doucet, pour son style novateur, avec des robes plus simples et pratiques à porter (ce que J-Philippe a toujours refusé de faire). Mais cela ne correspond pas au goût des aristocrates, des divas, (voire des demi-mondaines) qui constituent la clientèle de la maison Worth. Poiret part donc en 1903 pour fonder sa propre maison de couture.
En 1902 Gaston ouvre une succursale à Londres dans un immeuble partagé avec la maison Cartier.
En 1910 c’est son neveu J-Charles que J-Philippe désigne comme son successeur créatif. Il fréquente les artistes comme Jean Dunand qui décore son hôtel particulier de Neuilly ou Man Ray qui réalise des séries de photographies.
A partir de 1923 les lignes des robes sont fluides avec des coupes de manches et de cols, variées. Des ceintures taille basse font leur apparition. Il utilise des jeux de boutons qui deviennent décors et se laisse inspirer par l’Art Déco pour les motifs géométriques de ses imprimés.
En 1924 pour se diversifier, Jacques lance le premier parfum de couturier « Dans la nuit » avec un flacon élégant de René Lalique. Entre 1924 et 1947 une vingtaine de parfums furent créés par la Société des parfums Worth.
La fin d’un empire familial en 1954
En 1941 c’est Maurice, (fils de Jacques et de Suzanne Cartier), diplômé de Harvard, qui reprend la charge administrative et financière de la maison de couture. A son frère Roger (formé par J-Charles) échoit la direction artistique de 1935 à 1950. Mais avec la Seconde guerre mondiale les femmes ont d’autres préoccupations que leur frivolité et les différentes maisons de modes parisiennes sont quasiment à l’arrêt.
Après la guerre et le rationnement, une vague de modernité est apportée par Christian Dior qui lance sa ligne « Corolle » dans sa première collection de 1947 et rencontre un vif succès.
La maison Worth n’est plus dans l’air du temps, Roger s’est retiré en 1950 et Maurice va vendre la société créée par son arrière grand-père, à la maison Paquin en 1954, qui elle-même, cessera ses activités quelques années plus tard.
Source : Revue Connaissance des arts – Hors série Worth suite à l’exposition à Paris en 2025